Sandrine Alouf, atmosphériste

"e ne me considère ni comme une décoratrice et encore moins comme une architecte d’intérieur. Je n’aime pas les cases, je ne peux encore moins m’attribuer le mérite d’être décoratrice ou architecte d’intérieur alors que je n’ai pas fait d’études pour. Ce n’est pas juste pour ceux qui en ont fait et se battent pour se faire connaître."

Mi-belge, mi-libanaise, Sandrine Alouf a parcouru le monde à la recherche d’inspirations et d’aventures pour ses créations futures. A l’origine des très décalés hôtels Déclic à Paris, Excelsior à Nice ou encore du Royal Ours Blanc à l’Alpe D’Huez, Sandrine Alouf a surtout la tête dans les nuages, littéralement. Ce besoin d’évasion, on le retrouve un peu partout, dans ses créations, dans ses œuvres, dans les hôtels sur lesquels elle a travaillé. Très vite, elle s’est imposée comme « atmosphériste » et se considère « créatrice de voyages immobiles ». Rencontre.

Mandaley : Bonjour Sandrine Alouf, pouvez-vous vous présenter en quelques mots à nos lecteurs ? Quelle est votre parcours ?
Sandrine Alouf :
Je suis née en Belgique, je suis d’origine libanaise, et je suis arrivée à Paris en 2000 à la demande de ma grand-mère. Je viens d’une famille de trois générations d’artistes. Ma grand-mère était professeur d’arts et décoratrice, et mes parents graphistes. J’ai donc baigné dans un univers artistique, ce qui m’a poussé à faire des études en Histoire de l’Art, pour devenir par la suite conservatrice dans un musée.

Mandaley : Vous vous considérez comme une « atmosphériste », un terme que vous avez vous-même créé pour qualifier votre métier. En quoi cela consiste exactement ? Peut-on vous qualifier d’architecte d’intérieur, décoratrice ?  Ou est-ce complètement différent ?
Sandrine Alouf :
C’est complètement différent ! Je ne me considère ni comme une décoratrice et encore moins comme une architecte d’intérieur. Je n’aime pas les cases, je ne peux encore moins m’attribuer le mérite d’être décoratrice ou architecte d’intérieur alors que je n’ai pas fait d’études pour. Ce n’est pas juste pour ceux qui en ont fait et se battent pour se faire connaître. J’ai donc créé un terme : « atmosphériste », pour qualifier mon métier. J’arrive  à ressentir l’âme d’un lieu, lui conférer un vécu, une histoire.  Je crée donc des atmosphères pour faire ressentir des émotions, dès l’entrée d’un lieu. Et puis j’ai inventé ce terme car je me suis rendue compte que si je ne mettais pas un mot sur mon métier, personne ne saurait exactement ce que je fais. Je n’avais pas envie de réduire mon métier à une fonction ou une mission.

Mandaley : Vous vous êtes fait connaître en 2006, lorsque vous avez transformé, pendant un an, la station du RER Luxembourg en un ciel bleu d’été ponctué de nuages. Depuis, vous en parsemez certains plafonds d’hôtels, ainsi que leurs murs. Peut-on dire que c’est devenu votre signature ?
Sandrine Alouf :  
Oui, dans chaque hôtel sur lequel j’ai travaillé, j’ai tenu à y inclure des nuages, que ce soit sur un tableau, au plafond, sur les murs, au sol…Depuis mon exposition au Luxembourg, ma vie a basculé. Un architecte m’a contacté pour décorer la réception d’un hôtel. Je lui ai dit par la suite que je rêvais de dormir dans un nuage. C’est donc de là que m’est venue l’idée d’imposer un lit en lévitation à 1 mètre 50 du sol au sein de l’hôtel Five à Paris. Mon univers est onirique, c’est une signature que l’on retrouve d’ailleurs à l’hôtel Whistler, à deux pas de la Gare du Nord et qui rend hommage au train, aux voyages… Les nuages se dessinent dans l’ascenseur de l’hôtel et se confondent en un nuage de fumée sorti d’un train. Même à l’hôtel Villa Lafayette, l’un de mes derniers projets en date, les nuages sont présents, de façon très subtile, dans des cadres, sur les murs.

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L’hôtel Whistler

Mandaley : Justement, l’Hôtel Villa Lafayette est plus sobre que les autres hôtels auxquels vous avez collaboré. Pourquoi ce choix de pureté et de sobriété ? Qu’avez-vous voulu transmettre dans ce nouveau lieu de vie ?
Sandrine Alouf : Je voulais quelque chose de différent, de plus pur, de plus modéré. Un hôtel où l’on se sent comme dans un appartement parisien, décoré de façon subtile. J’ai fait énormément d’hôtels thématisés et avec l’hôtel Villa Lafayette j’avais besoin de renouveau. Pour l’hôtel Whistler, j’ai voulu m’éloigner de la simple décoration contemplative pour instaurer une expérience interactive, où l’on a envie d’ouvrir des malles, d’être curieux, de s’emparer du lieu. On prend possession de la chambre, on s’approprie les espaces. C’est ça le « voyage immobile » selon moi.

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L’hôtel Villa Lafayette

Mandaley : Quelle est la signification du vrai luxe pour vous ?
Sandrine Alouf : Pour moi, le luxe, c’est la liberté. D’ailleurs, je considère avoir une vie très luxueuse puisque je peux faire ce que je veux, de mon temps, de mon métier. En terme de confort, le luxe c’est la literie, surtout dans un hôtel, où le couchage, les matelas, les oreillers sont des choses non négligeables. Je préfère réduire ma déco et me concentrer sur le confort, car une fois la lumière éteinte, la décoration s’estompe, le bien-être reste.

Mandaley : Parlons voyage à présent…Quelle est votre tenue idéale selon vous pour voyager ?
Sandrine Alouf :
Pour voyager, je privilégie les baskets pour être à l’aise quand je prends l’avion. Les chaussures à talon sont à bannir car trop inconfortables ! Une tenue décontractée, en somme, que j’accompagne d’un châle léger pour me tenir chaud, car je suis de nature frileuse et il fait souvent froid dans les cabines.

Mandaley : Quel est l’objet qui ne vous quitte jamais lors de vos voyages ?
Sandrine Alouf :
Sans hésiter, un crayon à papier. Idéal pour pouvoir prendre des notes, dessiner, esquisser des idées. Je ne me sépare pas non plus de mon appareil photo, bien évidemment.

Mandaley : Quel est votre endroit préféré dans le monde ?
Sandrine Alouf :
Même si j’ai beaucoup voyagé, l’endroit qui me tient le plus à cœur reste là où je suis en famille. Il suffit que je me retrouve autour d’une table, auprès des miens pour que je me sente bien. J’aime revenir aux sources, je suis très terrienne, j’ai besoin de mes repères.

Sandrine-Alouf-portrait

Mandaley : Que vous apportent vos voyages ?
Sandrine Alouf :
Je voyage souvent toute seule. J’ai fait le tour du monde deux fois ! (rires). J’adore voyager, ça m’apprend à m’ouvrir aux autres, au monde, aux cultures. Il est important de s’éloigner des préjugés, de découvrir les villes, les différences, de réveiller les consciences.

Mandaley : Enfin, avez-vous une anecdote de voyage à nous raconter ?
Sandrine Alouf :
Nous étions plusieurs photographes à participer au concours pour le tour du monde des sources d’eau pour Nestlé, et le jour où j’ai su que j’étais sélectionnée, j’ai appris que j’étais enceinte. Je me souviens avoir dit à mon conjoint que je tenais à faire partie du projet et qu’il ne réussira pas à m’en empêcher. Il m’a donné sa bénédiction, tout en me demandant de ne pas m’engager jusqu’au terme de ma grossesse. Personne ne savait autour de moi que j’étais enceinte, et j’ai réussi à le cacher jusqu’à huit mois et demi : on ne voyait rien de mon ventre ! (rires). Je suis passée par la Belgique, le Liban, les deux pays d’où je viens. J’ai trouvé ça tellement beau de revenir à mes sources, tout en portant mon enfant. Et aujourd’hui, lorsqu’il me demande s’il a été à tel ou tel endroit, je lui réponds que oui !

> Pour en savoir plus sur Sandrine Alouf et ses projets, rendez-vous sur son site.

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